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Réunion des élus du Bloc dans un contexte de sondages défavorables

durée 04h00
25 février 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Par La Presse Canadienne, 2024

VICTORIAVILLE — Alors que le Bloc québécois est en fort recul dans les intentions de vote, ses députés se réunissent mardi et mercredi pour ce qui a toutes les allures d’une ultime rencontre de caucus avant le déclenchement d’élections générales.

«Je ne pense pas qu'ils devraient paniquer», a jugé le professeur de science politique à l'Université de Sherbrooke, Jean-François Daoust, en entrevue lundi soir avec La Presse Canadienne.

M. Daoust a expliqué qu'il y a régulièrement «un effet qu'on appelle "rally around the flag"» où une population se rassemble derrière le gouvernement sortant. Les meilleurs exemples sont la COVID et les attentats du 11 septembre, a-t-il dit. Au Canada, c'est Mark Carney – le favori de la course libérale – qui semble incarner le plus gros de l'avantage de cet effet.

Un sondage de la firme Léger réalisé du 14 au 17 février révélait que la formation souverainiste n’obtient plus que 28 % des appuis au Québec. Ils étaient de 29 % dans un sondage de la même firme réalisé du 7 au 10 février, et de 37 % dans celui réalisé du 24 au 26 janvier.

Le plus récent sondage révèle également que le Bloc baisse encore plus, à 25 %, lorsque les électeurs se font offrir l’option de voter pour Mark Carney plutôt que Justin Trudeau. Dans ce scénario, les libéraux obtiennent neuf points de plus au Québec que sous M. Trudeau. Ils font reculer les conservateurs de quatre points et les néodémocrates de trois points.

Les trois sondages ont été menés en ligne auprès de près 1500 répondants. Ils ne comportent pas de marge d’erreur puisqu’il ne s’agit pas d’échantillons probabilistes.

L'augmentation du patriotisme canadien au Québec est aussi «de mauvais augure» pour le Bloc québécois, a expliqué le professeur Daoust, parce que «plus le patriotisme canadien est fort et moins les gens sont portés à voter pour un parti indépendantiste, séparatiste, anti-canadien dans un certain sens».

Entre décembre et février, le pourcentage de Québécois qui se disent «très fiers» ou «fiers» d’être Canadiens a augmenté de 13 points de pourcentage, passant de 45 % à 58 %. Et, à l'échelle nationale, la hausse est de neuf points, passant de 58 % à 67 %, selon ce sondage Angus Reid réalisé en ligne il y a trois semaines auprès de 1578 Canadiens.

Le coup de sonde a également révélé une hausse de la proportion de Canadiens qui affirment avoir un «profond attachement émotionnel au Canada»: elle est passée de 30 % à 45 % au Québec et de 49 % à 59 % dans l’ensemble du Canada.

Selon M. Daoust, le Bloc québécois pourrait réussir à maintenir un bon nombre de sièges lors des prochaines élections générales, mais la perspective de faire des gains importants que laissaient entrevoir les sondages des derniers mois s'estompe.

Dans l'entourage du chef Yves-François Blanchet, on reconnaît qu'on est «dans un autre univers» avec les menaces de tarifs du président américain Donald Trump et qu'il s'agit de «la pire menace économique» pour le Canada et le Québec des 50 dernières années.

On assure aussi qu'il n'y a «pas du tout» de sentiment de crise et que les chiffres sont mêmes «prometteurs», puisqu'ils n'ont malgré tout pas été aussi forts à la veille d'une campagne électorale depuis celle de 2015, inclusivement.

Recadrer le message... ou pas vraiment

La réunion qui se tient à Victoriaville, dans le Centre-du-Québec, débutera mardi en début d’après-midi avec un mot d’ouverture du chef, Yves-François Blanchet. Un rassemblement militant est prévu en soirée.

Le lendemain, les députés se mettront à l’ouvrage dès 8 h et M. Blanchet prévoit répondre aux questions des journalistes en fin de matinée. C'est à ce moment que le chef entend dire comment il va se repositionner face à la nouvelle donne.

Selon le professeur Daoust, les bloquistes n'ont pas besoin de se repositionner. Il parie qu'ils ressortiront «le bon vieux chien de garde» pour recadrer leur message.

«La seule ligne qui peut être à leur avantage c'est: “On a une crise, le Canada répond de façon unie face à la crise, et ça, ça peut être désavantageux pour le Québec. Et la seule façon que ça ne soit pas si désavantageux pour le Québec, c'est d'avoir une voix forte à Ottawa. Et ce serait le Bloc québécois qui serait la solution de ce côté-là”», a-t-il résumé.

Lors de leur réunion, les élus du Bloc se trouveront alors dans la circonscription de Richmond-Arthabaska, qui est représentée par l’ancien maire de Victoriaville Alain Rayes depuis 2015. Or, M. Rayes a claqué la porte du Parti conservateur avec l’arrivée de Pierre Poilievre et siège comme indépendant. Il a annoncé qu’il ne sollicitera pas un nouveau mandat.

Les bloquistes estiment qu’ils ont des chances de renverser l’avance de 25 points qu’avaient creusée les conservateurs lors du scrutin de 2021, et signalent qu’ils ont «longtemps» détenu la circonscription.

En fait, André Bellavance y a été député de 2004 à 2015. Autrement dit, même lorsque le caucus du Bloc avait été décimé en 2011 au point où il n'avait que quatre députés, la formation avait conservé la circonscription.

Ainsi, lundi, une forte délégation bloquiste est allée à la rencontre de la population et des acteurs de la région pour entendre leurs doléances. Ils savent, disent-ils, que la région compte énormément sur l’exportation, fait beaucoup affaire avec les Américains et que la menace tarifaire du président Trump les affecte beaucoup.

Quoi qu'il en soit, l'ambiance au rassemblement de mardi soir risque d'être fort différente de celle à Laval, un mois plus tôt, alors que les militants cachaient mal leur enthousiasme.

L’ancien maire de Laval Marc Demers se disait même impatient d'écrire «une page d’histoire historique pour la nation québécoise» alors qu'une «victoire» du Bloc mettrait «la table pour l’élection du PQ» et «pour le référendum».

Le chef, Yves-François Blanchet, qui avait néanmoins multiplié les appels à la retenue, n'avait pu s'empêcher de parler de «moments extraordinaires qu’il faut goûter».

Michel Saba, La Presse Canadienne