Paradis fiscaux et la connaissance du Québec au jour 4 de la campagne électorale


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Des révélations sur l'utilisation d'un paradis fiscal par Mark Carney lorsqu'il travaillait à la société d'investissement Brookfield ont porté ombrage à la campagne du chef libéral, qui est accusé par son rival néo-démocrate de vouloir défendre en premier lieu les ultrariches.
M. Carney a débuté sa quatrième journée de campagne, mercredi, en devant répondre à des informations rapportées par Radio-Canada.
Le diffuseur public a révélé que le premier ministre fédéral sortant a coprésidé deux fonds d'investissement, qui ont été enregistrés aux Bermudes, un territoire décrit par plusieurs comme un paradis fiscal.
M. Carney a assuré que des impôts avaient été payés en lien avec ces fonds. En conférence de presse à Windsor, en Ontario, il a expliqué que «les investisseurs dans les fonds de Brookfield (...) est une méthode afin d'avoir les rendements pour des gens qui bénéficient des investissements».
Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, croit plutôt que l'ancien banquier a délibérément enregistré «ces fonds dans un autre pays pour éviter de payer des taxes». M. Singh a de nouveau répété être «là pour M. et Mme Tout-le-monde», contrairement à son adversaire libéral.
Les chefs bloquiste et conservateur ont tous deux demandé à M. Carney de divulguer l'ensemble de ses intérêts économiques, de ses avoirs et de ses actifs.
Le dirigeant du Parti libéral du Canada a dû également revenir sur la bévue qu'il a commise la veille et qui l'a mise dans l'embarras. Il s'est excusé publiquement pour avoir décrit sa candidate Nathalie Provost comme une survivante de la tuerie de l'Université Concordia plutôt que celle de Polytechnique Montréal, où une fusillade a coûté la vie à 14 femmes en 1989.
Cet épisode démontre, selon le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, que M. Carney «ignore tout du Québec».
Ce dernier a assuré qu'il «aime le Québec» et son «histoire», notamment. «Je viens d'Alberta, c'est évident que mon français est loin d'être parfait, mais j'aime le Québec», a-t-il dit lorsque questionné à savoir s'il considère qu'il manque de connaissances sur les particularités de la province.
Mieux Carney ou Poilievre?
M. Blanchet s'est aussi retrouvé à devoir expliquer des propos qu'il a tenus au micro de l'animateur Patrick Lagacé au 98,5, mercredi matin.
Le chef bloquiste a nié avoir insinué au moment de l'entrevue radiophonique qu'il préférait le conservateur Pierre Poilievre à M. Carney.
«Je n'ai jamais dit que je préférais M. Poilievre et je nous invite à être rigoureux», a affirmé M. Blanchet lors d'un point de presse à Montréal.
En entrevue avec M. Lagacé, plus tôt en matinée, le bloquiste s'était fait demander qui était le «moins pire» des deux hommes.
Le politicien a répondu qu'il ne donnait pas du tout son appui à M. Poilievre. Il a toutefois souligné qu'on savait davantage à quoi s'en tenir avec le chef conservateur, contrairement à M. Carney qu'il décrit comme une «boîte de Pandore».
Dans une relance où l'animateur lui a demandé si «à tout prendre, pour vous, c'est lui (Poilievre) le meilleur», M. Blanchet est allé encore plus loin.
«On le connaît davantage. (...) Je n'ai pas une grande confiance, mais bon: on sait c'est qui. C'est juste ça. La seule différence, c'est qu'on sait c'est qui. M. Carney, on a l'impression qu'on découvre chaque jour un peu plus», a-t-il soutenu.
Ne faisant ni une ni deux, le NPD a sauté sur l'occasion, en affirmant qu'il est «triste» que «Blanchet décide de s'associer à Poilievre une autre fois».
Promesses fiscales
Sur le plan des promesses au jour 4 de la campagne fédérale, le chef du Parti conservateur du Canada (PCC) a courtisé les aînés.
M. Poilievre leur a notamment promis la possibilité de conserver leurs économies dans des REER jusqu'à l'âge de 73 ans, comparativement à 71 ans actuellement. Il s'est aussi engagé à maintenir l'âge de la retraite à 65 ans pour différents programmes fédéraux touchant les aînés, comme la Sécurité de la vieillesse, s'il est porté au pouvoir le 28 avril.
Pour leur part, les libéraux ont promis de mettre sur pied, s'ils remportent les élections, un réseau de construction automobile «100 % canadien», ainsi qu'un fonds stratégique de 2 milliards $, notamment pour protéger les emplois et bâtir une chaîne d'approvisionnement canadienne plus forte.
Les bloquistes ont, quant à eux, parlé de culture. M. Blanchet a réclamé que l'argent tiré de la taxe de 3 % sur les services numériques soit versé dans un fonds géré par l'industrie des arts et de l'information du pays, plutôt que dans le fonds consolidé du gouvernement.
Chez les néo-démocrates, M. Singh a proposé une série d'allégements fiscaux, dont un concernant le montant personnel de base (le montant sur lequel une personne ne paie pas d'impôt fédéral sur le revenu). Il suggère que toute personne gagnant moins de 177 882 $ ne paie pas d'impôt sur les premiers 19 500 $ de son revenu, ce qui permettrait d'économiser environ 505 $ par an.
Les Verts ont aussi fait une promesse en ce sens, mais plus généreuse.
S'il est porté au pouvoir, le Parti vert entend faire passer le montant personnel de base de 15 700 $ à 40 000 $. Cette augmentation serait limitée aux personnes dont le revenu est inférieur à 100 000 $, ce qui représente environ 78 % des contribuables qui se retrouveraient avec 3675 $ de plus dans leurs poches par année.
— Avec des informations d'Émilie Bergeron, de Michel Saba et de Pierre Saint-Arnaud
Frédéric Lacroix-Couture, La Presse Canadienne