Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

Montréal impose des restrictions majeures à la location à court terme de type Airbnb

durée 15h26
30 janvier 2025
La Presse Canadienne, 2024
durée

Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — L’administration Plante a décidé de sortir le bâton pour mettre un frein à la location à court terme de type Airbnb – qu’elle soit légale ou pas – dans l’espoir de remettre au moins 2000 logements sur le marché. «Aujourd'hui mon message c'est que le commerce illégal sur le dos des locataires montréalais, c'est fini», a lancé la mairesse Valérie Plante, jeudi, en annonçant les mesures visant à restreindre sévèrement la location à court terme.

Mme Plante n’avait cependant même pas encore fait son annonce, jeudi, qu’elle était déjà attaquée par la ministre du Tourisme du Québec, Caroline Proulx, qui réagissait aux détails de l’annonce éventés par le Journal de Montréal dans son édition du matin.

«La mairesse Valérie Plante cherche un coupable pour son inaction à monter du logement et le grand coupable bien c'est l'hébergement courte durée», a-t-elle ironisé depuis Québec avant même d’avoir entendu la conférence de presse de Mme Plante.

Inspections et amendes aux illégaux

Informée de ces propos, Mme Plante a aussitôt répliqué. «Moi, je ne pense pas qu'une ministre doit être confortable que sa loi soit autant bafouée», a-t-elle envoyé, visiblement irritée, en faisant référence au fait que ses services recensent quelque 4000 annonces de location à court terme alors qu’il n’y a qu’un peu plus de 2000 de ces annonceurs qui sont dûment enregistrés pour le faire.

Ce sont ces 2000 autres logements illégaux qu'elle espère d'abord retirer du marché de location à court terme pour les redonner aux locataires montréalais. Tout indique par ailleurs que ce chiffre de 2000 illégaux est grandement sous-estimé.

Puisque Montréal est confrontée à une grave crise du logement, l’administration Plante annonce l’ajout de six inspecteurs aux quatre déjà en place pour débusquer les logements en location illégale et les redonner aux véritables locataires, ainsi qu’une nouvelle façon de faire pour accélérer le traitement des constats d’infraction. Le montant de l’amende est également porté au maximum permis par la loi, qui est de 1000 $ pour une première infraction, mais des amendes supplémentaires de 2000 $ pourront aussi être émises par jour de récidive.

Toujours possible, mais restreint

Quant à ceux qui sont en règle, les règlements que la Ville impose pourraient en inciter plusieurs à tout simplement abandonner la pratique. C'est que la location à court terme sera permise, mais seulement entre le 10 juin et le 10 septembre, durant la haute saison touristique, et interdite du 11 septembre au 9 juin. En fait, seules les quelque 300 résidences de tourisme commerciales enregistrées dans les secteurs dits «commerciaux» de certains arrondissements pourront continuer à opérer à l’année comme avant.

Selon Valérie Plante, c’est là la seule façon de respecter la notion même d’économie de partage, dont l’objectif est de permettra à un locataire de louer son logement lorsqu'il s’absente durant une courte durée.

Multiples arnaques

Un des problèmes est que le principe de la résidence principale est régulièrement bafoué par les spéculateurs à la recherche d’une rentabilité maximale des édifices à logements dont ils se portent acquéreurs. Mme Plante a énuméré une série de stratagèmes utilisés par ces spéculateurs pour arriver à leurs fins, dont de fausses déclarations d'adresse, des locations fictives à des amis ou des membres de la famille qui déclarent les unités de logement comme leurs résidences principales, mais qui sont ensuite louées entièrement de manière commerciale.

Dans certains cas, des propriétaires louent des unités exclusivement à des étudiants étrangers pour pouvoir les louer à court terme une deuxième fois durant l’été lorsque ces étudiants retournent dans leur pays pour les vacances. D’autres stratagèmes rencontrés comprennent de faux baux avec des prête-noms, des appartements multiples cachés derrière une seule annonce ou encore des couples déclarant deux adresses principales alors qu’ils habitent ensemble.

«Il y a des gens qui ont développé des modèles d'affaires basés sur les locations illégales de logements», a dénoncé la mairesse qui a même fait état d’un immeuble de sept logements entièrement occupés par le crime organisé.

Projet-pilote concluant

Déjà, grâce à un projet-pilote dans trois arrondissements avec ses quatre inspecteurs, la Ville de Montréal a mis au jour plusieurs de ces stratagèmes après 920 inspections qui ont mené au dépôt de 126 constats d’infraction. C’est cette opération qui l’a amenée à trouver des façons d’accélérer le processus de traitement des constats puisqu’elle a constaté qu’avec les règles actuelles, il faut près d’un an avant d’arriver au bout du processus.

Le projet de règlement sera adopté le 24 mars et les occupants de résidences principales qui voudront toujours faire de la location à court terme entre le 10 juin et le 10 septembre devront obtenir un permis d’exploitation émis par la Ville, au coût de 300 $. Ainsi, si jamais les 2142 résidences principales qui sont actuellement en règle décidaient de poursuivre en respectant les limites du 10 juin au 10 septembre, la Ville récolterait plus de 640 000 $.

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne