Michael Sabia voit l'accord avec Terre-Neuve-et-Labrador comme une rupture nette


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Par La Presse Canadienne, 2024
SAINT-JEAN — Le président-directeur général d'Hydro-Québec était au Labrador lundi pour visiter une immense centrale hydroélectrique au cœur d'un projet d'accord énergétique présenté comme un nouveau départ dans les relations tendues entre le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador.
Michael Sabia s'est adressé aux journalistes depuis l'installation de Churchill Falls au Labrador, affirmant que l'accord provisoire constituait une «rupture nette» avec un contrat «déséquilibré et probablement injuste» que Terre-Neuve-et-Labrador tentait depuis longtemps d'annuler.
«Cet accord ouvre vraiment un nouveau chapitre, un chapitre beaucoup plus équilibré et plus collaboratif, dans l'histoire entre Terre-Neuve-et-Labrador et le Québec, a déclaré M. Sabia. À notre avis, il s'agit d'un accord très équilibré.»
Les négociations visant à conclure des contrats définitifs d'ici avril 2026 se déroulent «à toute vitesse», a-t-il ajouté.
L'accord provisoire dévoilé en décembre a suscité un examen minutieux dans la province la plus à l'est du Canada. Terre-Neuve-et-Labrador se sent depuis longtemps lésée par un contrat de 1969 qui permettait à Hydro-Québec d’acheter plus de 80 % de l’électricité de Churchill Falls à des prix dérisoires — et d’en tirer la majeure partie des profits. En 2019, l’entente avait rapporté près de 28 milliards $ de profits au Québec et environ 2 milliards $ à Terre-Neuve-et-Labrador.
Le contrat devait expirer en 2041, mais la nouvelle entente y mettrait fin le 1er janvier 2025, Hydro-Québec payant des tarifs en constante augmentation pour l’énergie de Churchill Falls. Ces tarifs commenceraient rétroactivement à 1,63 cent par kilowattheure — comparativement au prix actuel de 0,2 cent — et augmenteraient à 7,84 cents d’ici 2041. D’ici 2056, le prix atteindrait 19,4 cents.
Certains observateurs de l’énergie à Terre-Neuve-et-Labrador se demandent pourquoi Hydro-Québec continuerait à payer des prix bas au cours des premières années du nouveau contrat. M. Sabia a expliqué qu'il s'agissait d'une question de mise en œuvre progressive de l'accord.
«Nous pensons que cela fait partie d'un accord équilibré, qui prévoit des augmentations très, très substantielles de nos paiements (…) et qui s'échelonnent au fil du temps, ce qui nous donne la possibilité de nous adapter à cette augmentation très substantielle», a-t-il déclaré.
La nouvelle entente offre également à Hydro-Québec la possibilité de codévelopper davantage de projets au Labrador avec Newfoundland and Labrador Hydro, notamment une nouvelle centrale hydroélectrique à Gull Island, qui se trouve le long du même fleuve que la centrale de Churchill Falls.
Le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador visent depuis des années à développer Gull Island, et les provinces ont conclu un projet d'accord sur son développement en 2002, mais celui-ci a finalement échoué.
Michael Sabia a déclaré qu'il était «à 100 %» optimiste que Gull Island ira de l'avant cette fois-ci.
«Y a-t-il un pourcentage supérieur à 100 % ?, a-t-il demandé. Parce que si c'est le cas, c'est là que je serais.»
M. Sabia a indiqué que le nouvel accord comportera des mécanismes permettant de lier les prix de l'énergie au marché, ce qui manquait dans le contrat de 1969. Il donnera également à Terre-Neuve-et-Labrador accès à un «bassin croissant d'énergie», a-t-il déclaré.
Si tout ce qui est prévu dans le projet d'accord se concrétise, il promet plus de 225 milliards $ de nouveaux revenus au trésor provincial de Terre-Neuve-et-Labrador d'ici 2075. Environ 180 milliards $ proviendront des nouveaux tarifs payés par Hydro-Québec pour l'électricité de Churchill Falls, ont déclaré des responsables.
La centrale de Churchill Falls a une capacité de production d'environ 5400 mégawatts et produit environ 34 milliards de kilowattheures par an, soit à peu près assez pour alimenter le Danemark, selon l'Energy Information Administration des États-Unis.
Sarah Smellie, La Presse Canadienne