Manifestations contre la fermeture de sites de consommation supervisée en Ontario
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Par La Presse Canadienne, 2024
TORONTO — Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant le ministère de la Santé de l'Ontario à Toronto, mardi, deux jours avant les élections provinciales, pour protester contre le projet du gouvernement Ford de fermer 10 sites de consommation supervisée de drogues d'ici la fin mars.
Le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford a annoncé l'été dernier qu'il fermerait ces sites, dont cinq à Toronto, en raison de leur proximité avec des écoles et des garderies. Le gouvernement Ford a également interdit l'ouverture de nouveaux sites, car il s'éloigne de la réduction des risques pour adopter une approche basée sur l'abstinence.
Il souhaite plutôt lancer 19 nouveaux «carrefours d’aide aux sans-abri et de lutte contre les dépendances», ainsi que 375 logements hautement supervisés, pour un coût prévu de 378 millions $.
S'exprimant lors de la manifestation au centre-ville de Toronto, Suzanne Fish, de la «Leslieville Harm Reduction Coalition», a déclaré que la fermeture des sites de consommation supervisée entraînera davantage de décès par surdose en Ontario.
Elle soutient que ces sites offrent plus qu'une simple supervision de la consommation de drogue. «Ces sites sont de minuscules mais puissants havres d'amour et de soins pour les personnes les plus marginalisées, a-t-elle expliqué.
«On ne peut pas fermer ces sites et considérer en même temps que les personnes qui consomment des drogues et les personnes marginalisées comptent.»
La docteure Ritika Goel, médecin de famille et militante basée à Toronto, plaide que la crise de la drogue a déjà coûté la vie à trop de personnes en Ontario, y compris des personnes dont elle s'est occupée.
«En cette période de crise, nous devons faire tout ce que nous pouvons pour sauver des vies et soutenir les gens, a-t-elle déclaré. Nous devons garder les gens en vie. C'est ce que font les sites de consommation supervisée.»
Des rassemblements similaires ont eu lieu dans d'autres villes de l'Ontario mardi, notamment à Barrie, Guelph, Hamilton et Ottawa. Les manifestants ont appelé le prochain gouvernement provincial à soutenir les sites de consommation supervisée et à faire davantage pour aider les sans-abri.
Pas un enjeu de campagne
Les chefs des principaux partis en Ontario ont débattu plus tôt ce mois-ci de la manière dont ils allaient gérer la crise des dépendances, qui figure parmi les principales préoccupations de nombreuses municipalités, mais la question n'a pas été au premier plan de la campagne électorale, en vue du scrutin de jeudi.
Le Parti vert, dirigé par Mike Schreiner, a été le seul grand parti à s'engager pendant la campagne éclair à inverser la politique actuelle du gouvernement Ford et à maintenir ouverts les sites de consommation supervisée.
Interrogé lors du lancement de sa plateforme sur ce que son parti était le seul à prendre un tel engagement, M. Schreiner a déclaré: «Cela nous indique qu'il y a une crise des soins en Ontario».
Les opioïdes ont fait plus de 2600 morts en Ontario en 2023, la dernière année complète pour laquelle des données sont disponibles.
De nombreuses personnes aux prises avec une dépendance ont également du mal à accéder à un logement abordable. L'Association des municipalités de l'Ontario a constaté dans un récent rapport que plus de 80 000 personnes étaient sans abri l'année dernière.
Le médecin hygiéniste de Toronto a déclaré le mois dernier que la fermeture des sites de consommation supervisée entraînerait une augmentation des surdoses et des appels d'urgence. La docteure Na-Koshie Lamptey a exhorté le gouvernement à envisager d’accroître l’accès au service.
Les progressistes-conservateurs au pouvoir ont déclaré qu’ils n’envisageraient pas cette possibilité et qu’ils iraient plutôt de l’avant avec les nouveaux centres et les restrictions prévues, invoquant les préoccupations en matière de sécurité soulevées par les familles à proximité des sites.
Le gouvernement a ordonné l’examen de 17 sites de consommation dans toute la province à la suite du meurtre d’une Torontoise qui a été touchée par une balle perdue lors d’une fusillade près de l’un des sites.
Karolina Huebner-Makurat se promenait dans son quartier de Leslieville, au sud-est de Toronto, peu après midi le 7 juillet 2023, lorsqu’elle a été abattue alors qu’une bagarre éclatait entre trois trafiquants de drogue présumés à l’extérieur du centre de santé communautaire de South Riverdale.
Maan Alhmidi, La Presse Canadienne