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L’absence de consentement bloque un projet de refuge de baleines en Nouvelle-Écosse

durée 16h09
19 mars 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

HALIFAX — Un ambitieux projet en Nouvelle-Écosse visant à construire le premier refuge côtier en Amérique du Nord pour des baleines en captivité pourrait être dans l'impasse.

Des documents obtenus par La Presse Canadienne révèlent que le Whale Sanctuary Project (WSP), un organisme sans but lucratif, n'a pas encore reçu l'approbation des cinq propriétaires des terrains adjacents à l'endroit où le groupe prévoit de construire un immense enclos flottant en filet pour les bélugas et les orques retirés des parcs d'attractions marins.

Les documents, obtenus grâce à la loi provinciale sur l'accès à l'information, indiquent que le groupe américain n'obtiendra pas de bail de la Couronne pour 81 hectares de terres et d'eaux près de Wine Harbour, en Nouvelle-Écosse, à moins que les propriétaires fonciers n'accordent leur consentement unanime.

Le directeur général, Charles Vinick, a déclaré mardi que le projet de 20 millions $ sur la côte est de la Nouvelle-Écosse, annoncé il y a cinq ans et soutenu par des dons privés, pourrait avorter.

«Il est concevable qu'une personne puisse empêcher le projet de voir le jour, malgré le soutien considérable qu'il reçoit dans la communauté. De nombreuses personnes estiment que le fait qu'une ou deux personnes interrompent un projet de cette nature est vraiment regrettable et serait dévastateur pour nous», a affirmé M. Vinick lors d'une entrevue en Arizona.

Il a confirmé que WSP avait obtenu le consentement écrit de deux des cinq propriétaires concernés et a indiqué que le groupe avait contacté deux des trois récalcitrants, mais que l'un d'eux avait refusé. La troisième propriétaire, une Montréalaise, n'a pas répondu à WSP.

En août, M. Vinick a écrit une lettre demandant au ministère des Ressources naturelles de la Nouvelle-Écosse de modifier les règles.

«Tout ralentissement de l'élan actuel pourrait avoir des conséquences vitales pour les animaux, qui dépérissent dans leur environnement actuel», a-t-il écrit dans la lettre.

«Les coûts associés à la poursuite du développement de notre site sont considérables, et il est déraisonnable et injuste envers nos nombreux donateurs et sympathisants d'aller de l'avant sans que le ministère puisse clarifier comment il peut atténuer la question du consentement unanime», a-t-il ajouté.

En réponse, le ministre des Ressources naturelles, Tory Rushton, a fait savoir qu'il n'avait pas l'intention de modifier les règles.

«Il y aura un impact sur les propriétés riveraines. Nous voulons nous assurer de ne porter atteinte à rien et que les promoteurs du projet fassent preuve d'ouverture et de transparence envers ces propriétaires fonciers», a-t-il affirmé en entrevue mardi.

Interrogé sur la possibilité d'accorder une exemption au groupe de M. Vinick, M. Rushton a répondu qu'il n'était «pas prêt à le faire pour le moment». Il a refusé de préciser s'il imposerait une date limite.

La lettre de M. Vinick montre clairement que le projet est à un tournant.

«Laisser échouer ce projet historique et transformateur parce que les propriétaires fonciers ne parviennent pas à trouver un terrain d'entente serait une catastrophe pour les baleines, pour la Nouvelle-Écosse, pour le Canada et pour le monde entier», a-t-il écrit le 19 août.

Dans les 500 pages de documents publiés par le ministère des Ressources naturelles, des courriels de propriétaires fonciers expriment leur inquiétude de perdre l'accès à l'eau une fois les filets installés autour de l'enclos de 40 hectares. D'autres se sont plaints de l'augmentation de la circulation, car WSP avait prévu de construire un centre éducatif à proximité, mais cette idée a été abandonnée.

Lors de l'annonce du projet en février 2020, les organisateurs avaient dit que le sanctuaire ouvrirait en 2022. Mais la pandémie de COVID-19 et les obstacles réglementaires ont entraîné des retards. M. Vinick a ensuite suggéré que 2024 et 2025 étaient des prévisions réalistes. Mardi, il a déclaré que 2026 était plus probable.

La France s'inquiète

En janvier dernier, le gouvernement français a rejeté la proposition de WSP d'offrir un refuge à deux orques résidant au parc Marineland d'Antibes, dans le sud de la France. En vertu de la loi française, les deux dernières orques captives du pays – Wikie et Keijo – doivent être retirées de la France d'ici la fin de l'année.

Les autorités françaises ont déclaré que le sanctuaire de la Nouvelle-Écosse ne serait pas prêt à temps et s'inquiètent des températures océaniques au large de la côte est de la province.

En février, WSP a fait une offre similaire lorsque le parc Marineland de Niagara Falls, en Ontario, a annoncé qu'il se préparait à accueillir de nouveaux propriétaires et à organiser le financement du parc et la relocalisation de plus d'une vingtaine de bélugas.

Dix-huit bélugas, une orque et un dauphin sont morts à Marineland depuis 2019, mais l'entreprise défend depuis longtemps son traitement des animaux, affirmant que ces décès font partie du cycle naturel de la vie. Le parc abriterait 31 bélugas, les dernières baleines captives au Canada.

À l'époque, la présidente du WSP, Lori Marino, avait déclaré que le groupe était «prêt» à commencer la construction sur le site néo-écossais.

M. Vinick a indiqué que le sanctuaire proposé pourrait éventuellement accueillir jusqu'à neuf bélugas, précisant que le projet pourrait se concrétiser rapidement une fois le consentement des propriétaires fonciers obtenu.

Entre-temps, les retards ont alimenté les spéculations selon lesquelles le projet serait une arnaque financière visant à enrichir Mme Marino et M. Vinick. Parmi les documents récemment publiés figurent des courriels de personnes anonymes alléguant une fraude, mais aucune d'entre elles n'a fourni de preuves.

M. Vinick rejette ces allégations. «Il est totalement faux de prétendre qu'il s'agit d'une collecte de fonds qui me profite personnellement ou qui profite personnellement à Lori Marino», a-t-il assuré.

Il a déclaré que WSP a accompli beaucoup de choses depuis 2020, ayant déjà réalisé une évaluation environnementale et des plans d'atténuation des risques. Il a toutefois confirmé que le projet nécessite davantage d'approbations de la part de Pêches et Océans Canada et de Transports Canada.

Michael MacDonald, La Presse Canadienne