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Les survivants autochtones de pensionnats demandent plus d'argent pour les recherches

durée 17h44
30 septembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

OTTAWA — Les survivants des pensionnats pour Autochtones affirment que le gouvernement fédéral maintient dans l'ombre la vérité sur ces institutions en réduisant le financement des archives et des recherches sur le terrain pour retrouver des tombes anonymes d'enfants qui sont morts dans ces établissements.

Plus de 150 000 enfants ont été forcés de fréquenter ces pensionnats fédéraux et de nombreux survivants ont décrit devant la Commission de vérité et réconciliation les horribles abus qu’ils y ont subis. On estime que 6000 enfants sont morts alors qu’ils fréquentaient ces écoles, bien que les experts affirment que le nombre réel pourrait être bien plus élevé.

En 2021, après que de nombreuses communautés des Premières Nations ont signalé avoir trouvé ce qui semblait être des restes humains sur les terrains d’anciens pensionnats, Ottawa est intervenu avec plus de 116 millions $ pour rechercher des tombes anonymes et commémorer les enfants décédés. En mars 2024, le gouvernement avait en fait fourni 216 millions $, par le biais de 146 accords de financement distincts, soit en moyenne environ 71 millions $ par année.

Dans le dernier budget, le gouvernement fédéral a alloué 91 millions $ au cours des deux prochaines années pour continuer à travailler à la recherche de sépultures non marquées, soit 45,5 millions $ par année.

Laura Arndt est responsable du Secrétariat des survivants, un organisme dirigé par des survivants qui cherche à documenter et à découvrir la vérité sur ce qui s'est passé à l'Institut mohawk de Brantford, en Ontario. Elle a critiqué ce qui, selon elle, ne peut être qualifié que de réduction du financement fédéral.

Des communautés autochtones et des organismes enquêtent sur les pensionnats depuis des décennies, notamment par le biais des archives. Les recherches au sol les plus récentes, à l'aide d'un radar, sont menées dans l'espoir de retrouver des défunts et de ramener les dépouilles dans leur communauté.

«Nous essayons de découvrir une histoire vieille de 150 ans, mais le financement limité qui nous a été accordé en trois ans ne peut pas nous le permettre», a fait valoir Mme Arndt.

Le Secrétariat des survivants a indiqué qu'une augmentation du financement aurait un impact considérable sur les communautés qui ont commencé leurs recherches et celles qui espèrent obtenir leur propre financement. Les communautés et les organismes ont été informés par téléconférence avec des représentants du gouvernement fédéral, et elles disent que leurs microphones ont été coupés et que leur capacité à s'opposer à la réduction des fonds a été muselée.

«Ils attendent qu'on meure, nous, les pauvres anciens pensionnaires», a argué Roberta Hill, une survivante de l'Institut mohawk des Six Nations de la rivière Grand, près de Hamilton, en Ontario. «Eh bien, on ne bouge pas: pas encore, à ma connaissance.»

«J'ai dit que je vivrai aussi longtemps que possible parce que je veux des réponses et je veux la vérité. Il n'y aura pas de réconciliation — absolument aucune — si vous nous mentez et nous faites cela.»

Le ministre recule

Au cours de l'été, le ministre des Relations Couronne-Autochtones, Gary Anandasangaree, a annulé une décision de limiter à 500 000 $ le financement de chaque communauté pour les recherches de dépouilles. Auparavant, les allocations individuelles étaient plafonnées à 3 millions $, et M. Anandasangaree a déclaré que le plafond initial serait rétabli.

S'exprimant sur la colline du Parlement lors de la cérémonie de la Journée de la vérité et de la réconciliation, lundi, le ministre n'a pas voulu discuter de la question du financement. «Je serai heureux d’aborder cette question de manière plus saine plus tard, en fonction de ce que nous avons fait», a-t-il déclaré en entrevue.

«J’ai entendu les témoignages des survivants et je pense que nous avons fait ce qu’il fallait en rehaussant le plafond et nous continuerons à travailler avec tous ceux qui sont touchés. Et j’ai hâte d’avoir cette conversation à un moment ultérieur.»

Scott Hamilton, professeur d’anthropologie à l’Université Lakehead, en Ontario, qui a participé aux enquêtes sur les pensionnats, estime que le gouvernement fédéral est obligé de fournir aux communautés le soutien nécessaire pour terminer le travail.

«Si nous choisissons de passer sous silence, si nous choisissons d’ignorer, si nous continuons à vivre dans un monde imaginaire où ces choses terribles ne se sont pas produites, ou n’étaient peut-être pas aussi terribles que ce qui a été dit, nous choisissons en quelque sorte de fermer les yeux et de fredonner une chanson pour ne pas avoir à témoigner de ce qui s’est passé – à affronter le fait que des choses terribles ont été faites au nom de notre nation», a soutenu le professeur Hamilton.

«Une part importante de l’héritage canadien consiste à affronter ces faits sombres et douloureux et à essayer de guérir et de rechercher la réconciliation. Mais on n’obtient pas de réconciliation sans reconnaître ces vérités douloureuses.»

Le Secrétariat des survivants a publié lundi un rapport demandant que 23 millions de documents soient remis au Centre national pour la vérité et la réconciliation, ainsi que les dossiers de la Gendarmerie royale du Canada relatifs aux enfants disparus et aux sépultures non marquées.

Le rapport indique également que le Canada doit fournir un financement stable et à long terme pour ces recherches et qu’il doit permettre aux communautés de déterminer le soutien dont elles ont besoin pour mener à bien leur travail.

Alessia Passafiume, La Presse Canadienne