La diminution des étudiants internationaux représente une menace pour des écoles
Temps de lecture :
4 minutes
Par La Presse Canadienne, 2024
La baisse spectaculaire du nombre de permis d'études internationaux délivrés l'an dernier devient rapidement une menace existentielle pour les finances des établissements postsecondaires canadiens, affirment des organisations qui représentent ces établissements.
«La baisse du nombre d'étudiants internationaux est comme un tremblement de terre qui frappe un système d'éducation déjà structurellement affaibli par des années de sous-investissement», a déclaré Gabriel Miller, président-directeur général d'Universités Canada.
Les provinces où les allocations de permis internationaux ont été augmentées l'an dernier connaissent également une baisse des inscriptions d'étudiants internationaux, ce qui crée des écarts budgétaires qui pourraient entraîner des coupes dans les programmes.
Le gouvernement fédéral a indiqué la semaine dernière que le Canada avait délivré environ 40 % de moins de permis d'études internationaux aux étudiants de la maternelle à la 12e année, aux étudiants postsecondaires et aux étudiants des cycles supérieurs l'an dernier, dépassant ainsi son objectif de 35 %.
Cette année, il cherche à réduire encore de 10 % le nombre d'étudiants internationaux.
Un rapport récent d'ApplyBoard, un marché en ligne pour les établissements d'enseignement, indique que le nombre de permis approuvés pour les étudiants universitaires a probablement chuté d'environ 60 %, tandis que les approbations pour les étudiants internationaux de premier cycle ont chuté d'environ 40 %.
Le nombre total de permis d'études internationaux délivrés par l'Ontario a également été essentiellement réduit de moitié par le plafond. ApplyBoard a affirmé qu'il prévoyait que la province connaîtrait une baisse de 55 % des approbations de permis internationaux en 2024.
Cette diminution spectaculaire a conduit le Centennial College de Toronto à suspendre 49 programmes à temps plein. L'Université de Winnipeg a récemment réduit son équipe de soccer féminin et son programme d'anglais pour trouver des économies de coûts, invoquant la pression exercée par la baisse des inscriptions internationales.
Le quota de l'Alberta pour les étudiants internationaux a été augmenté d'environ 10 % l'année dernière, mais on s'attend à une baisse de 30 % du nombre total d'approbations de permis d'études lorsque les données de 2024 seront comptabilisées, indique le rapport d'ApplyBoard.
Tous les niveaux affectés
Meti Basiri, cofondateur et PDG d'ApplyBoard, a affirmé que les nouvelles politiques du gouvernement fédéral visant à réduire le nombre d'étudiants internationaux ont semé la confusion et l'incertitude chez les étudiants qui envisagent de poursuivre leurs études au Canada.
«Cela concerne pratiquement tous les niveaux, qu'il s'agisse du doctorat, de la maîtrise, du primaire – même les programmes ou les niveaux (et) les institutions qui ne faisaient partie d'aucun de ces changements de politique», a-t-il précisé.
M. Basiri a indiqué que le déclin des étudiants internationaux a forcé de nombreux collèges et universités au Canada à réduire leurs programmes et à fermer des campus, ce qui signifie moins de programmes pour les étudiants nationaux dans les années à venir.
«Les frais de scolarité nationaux (vont) augmenter», a-t-il affirmé.
M. Miller a déclaré que les chiffres sont un «grand feu jaune clignotant et brillant pour le pays».
Le plafond nuira au Canada à long terme en l'obligeant à perdre de futurs travailleurs, a-t-il soutenu.
Les universités sont déjà en difficulté en raison de diverses décisions prises par les gouvernements provinciaux qui ont entravé leur capacité à générer des revenus, a dit M. Miller.
Le gouvernement de l'Ontario, par exemple, a gelé les frais de scolarité pour les étudiants canadiens jusqu'en 2027 au moins, bien qu'il ait injecté plus de 1,2 milliard $ en financement ponctuel l'année dernière en réponse aux réformes fédérales de l'immigration. En Alberta, les coupes dans le budget provincial de l'enseignement postsecondaire ont entraîné d'importantes augmentations des frais de scolarité pour les étudiants canadiens.
La chute des inscriptions internationales et les décisions de financement des gouvernements entraîneront probablement des licenciements, des classes plus nombreuses et des gels d'embauche, a déclaré M. Miller.
«Une baisse importante des inscriptions d'étudiants internationaux représente un changement fondamental dans le système de financement des universités canadiennes», a-t-il expliqué.
«Et à moins que ce système ne soit réparé maintenant par les gouvernements, nous ne serons pas en mesure de répondre aux besoins d'éducation de notre propre population née au Canada.»
Un déficit budgétaire à l'Université de Calgary
L'Université de Calgary a accueilli près de 9 % d'étudiants internationaux de moins l'automne dernier qu'à l'automne 2023, a dévoilé l'école dans un communiqué.
Elle a dit que la baisse équivaut à un impact d'environ 11 millions $ sur les revenus des frais de scolarité pour l'année. Elle n'a pas précisé comment elle serait affectée. «Cet impact s'accentuera au fil du temps, car les étudiants auraient dû être présents sur plusieurs années.»
L'université a affirmé dans un communiqué que, même s'il est trop tôt pour spéculer sur l'impact du plafond, il «entraînera certainement un déficit budgétaire, dont l'ampleur est actuellement en cours d'évaluation».
Ermia Rezaei-Afsah, président du syndicat étudiant de l'Université de Calgary, a dit que plusieurs programmes de l'école ont été gelés.
«Nous constatons que les plafonds fonctionnent mieux que prévu», a rapporté M. Rezaei-Afsah.
«Cela va empirer en 2025, a-t-il déclaré. Les dommages à la réputation sont immenses.»
Pari Johnston, présidente et directrice générale de Collèges et instituts Canada, a affirmé que l'organisation avait mis en garde contre les impacts «dévastateurs» des réformes.
«L'accès des étudiants canadiens à des programmes très demandés, la formation et le réservoir de talents dont dépendent les employeurs, ainsi que la capacité locale de recherche et d'innovation sont tous menacés», a fait valoir Mme Johnston.
Le gouvernement fédéral a affirmé que les difficultés de financement liées au plafond ne sont pas son problème.
Le ministre de l'Immigration, Marc Miller, a déclaré en décembre que le gouvernement «n'a demandé à aucune université ou aucun collège de facturer aux étudiants internationaux quatre ou cinq fois plus que ce que nous facturons aux étudiants nationaux».
Matthew Scace et Maan Alhmidi, La Presse Canadienne