La course libérale soulève des questions sur les activités de financement


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Seuls deux candidats dans la course à la direction du Parti libéral du Canada – Mark Carney et Ruby Dhalla – ont divulgué leurs activités de collecte de fonds à Élections Canada.
Un militant pour la transparence politique affirme que cela révèle une «échappatoire» dans les règles de financement des campagnes politiques qui doit être comblée, puisque certains des candidats ont organisé des collectes de fonds sans les divulguer publiquement ni indiquer qui y a participé.
M. Carney a signalé huit collectes de fonds à Élections Canada au cours des deux mois de la course, tandis que Mme Dhalla – que le parti a finalement expulsée de la course – en a divulgué une.
Mais Chrystia Freeland, qui a organisé plusieurs collectes de fonds pendant la course, et les candidats Frank Baylis et Karina Gould n'ont ajouté aucune information à la liste de divulgation publique.
Les candidats à la direction et les partis politiques doivent divulguer leurs collectes de fonds à l'avance s'ils remplissent certaines conditions – si, par exemple, au moins une personne a dû payer plus de 200 $ pour assister à une collecte de fonds. S’ils enfreignent la règle de divulgation, ils doivent restituer l’argent.
Une collecte de fonds organisée par Mme Freeland le 10 février et répertoriée sur Eventbrite dans la région d’Etobicoke à Toronto indique seulement que le «montant de don recommandé» était compris entre 500 $ et 1750 $.
Une «échappatoire» de la loi
«Il s’agit d’une échappatoire qui permet à quelqu’un d’aller faire du lobbying (sur les candidats) sans que cela soit divulgué», a souligné Duff Conacher, cofondateur de Democracy Watch.
Il a affirmé que le public a le droit de savoir qui organise et paie pour assister aux événements de collecte de fonds afin que l’accès aux politiciens par l'intermédiaire de dons puisse être suivi. Il estime que cela empêche l’apparence d’un conflit d’intérêts de «ternir les décisions politiques des politiciens».
Le gouvernement libéral a adopté le projet de loi C-50 en 2018 qui a inauguré les exigences de divulgation des collectes de fonds, en réponse à une vague de critiques à l’égard des collectes de fonds opaques et coûteuses mettant en vedette le premier ministre Justin Trudeau et d’autres ministres du cabinet.
«La raison d'être de cette loi était de suivre les événements de collecte de fonds et de savoir qui y participe», a indiqué M. Conacher.
Pas de «faille», selon un avocat
L'avocat Scott Thurlow, établi à Ottawa et expert en droit électoral canadien, dit qu'il ne décrirait pas cela comme une «faille», puisque les règles ont été conçues de cette façon.
«Le Parlement a pris la décision délibérée de faire cela, a-t-il avancé. Si une personne verse 200 $, il doit alors énumérer les donateurs qui le font.»
Les règles stipulent que les partis et les candidats ont un mois après avoir organisé une collecte de fonds qui compte comme un événement réglementé pour divulguer les noms des personnes qui y ont participé. Une collecte de fonds est également considérée comme un événement réglementé si des personnes éminentes y participent, comme des candidats à la direction, des chefs de parti ou des ministres du cabinet.
«Je ne pense pas que quiconque enfreigne les règles ici», a souligné M. Thurlow.
La porte-parole de la campagne de Chrystia Freeland, Katherine Cuplinskas, a assuré que la campagne «a suivi toutes les règles établies» par le parti et Élections Canada.
La campagne de Frank Baylis a organisé des dizaines d'événements en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario et au Québec, mais n'en a officiellement fait aucun événement de collecte de fonds.
«Tous nos événements tout au long de la campagne étaient des événements sans billetterie, a déclaré le porte-parole de la campagne de M. Baylis, Justin McIntyre. Les partisans pouvaient y assister à leur guise, en faisant un don s'ils le souhaitaient.»
La campagne de Karina Gould a déclaré auparavant qu'elle n'avait organisé aucun événement de collecte de fonds; elle n'a pas fait de commentaire lundi.
Mme Gould était la ministre des Institutions démocratiques qui a piloté le projet de loi C-50 au Parlement.
La campagne de Mark Carney a publié un rapport jusqu'à présent qui énumère les personnes qui ont assisté à une collecte de fonds organisée à Ottawa le 6 février. Parmi eux figuraient plusieurs lobbyistes libéraux éminents et des résidants du quartier chic de Rockcliffe à Ottawa, ainsi que l'ancien premier ministre de l'Ontario Dalton McGuinty.
Le prochain rapport de collecte de fonds de M. Carney, pour un événement organisé à Vancouver, en Colombie-Britannique, devra être divulgué dans quelques jours.
Sachit Mehra, président du Parti libéral, a déclaré dimanche soir que le parti venait de connaître son meilleur résultat de collecte de fonds «populaire» au premier trimestre, et la période de déclaration n'était même pas encore terminée.
Kyle Duggan, La Presse Canadienne