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Des actes médicaux chez la femme moins bien rémunérés que l'équivalent chez l'homme

durée 11h35
24 septembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Certains actes médicaux posés sur une femme sont nettement moins bien rémunérés que leur équivalent chez l'homme, démontre une nouvelle étude réalisée pour le compte de l’Association des obstétriciens et gynécologues du Québec (AOGQ).

Les écarts documentés par la firme Raymond Chabot Grant Thornton varient de 33 % à 218 % alors qu’il n’existe, selon l'AOGQ, aucun argumentaire médical pour le justifier.

Mais ce n'est pas seulement une question de dollars et de sous, a précisé la vice-présidente de l'AOGQ, la docteure Liliane Brassard.

«Je pense que les Québécois et les Québécoises ont le droit de savoir que la valeur qu'on accorde à un soin donné à une femme est inférieure à celle à un soin donné à un homme, a-t-elle dit. C'est le message qu'on envoie. C'est le principe de base d'équité, de soins en santé de la femme. C'est ça notre plus grand message.»

Certains des exemples fournis sont néanmoins frappants.

On constate par exemple qu'une curiethérapie de l'utérus est rémunérée à hauteur de 82,70 $, contre 262,60 $ pour une curiethérapie de la prostate, soit une différence de 218 %. L'écart entre une curiethérapie du col de l'utérus et une curiethérapie de la prostate est de 167 %.

Un prélèvement d'ovule à des fins de fertilisation in vitro est rémunéré à hauteur de 369,45 $, mais un prélèvement de spermatozoïdes aux mêmes fins est rémunéré à hauteur de 949,95 $, une différence de 157 %.

«C'est un geste similaire, pour un même traitement, a dit la docteure Brassard. Il n'y a pas d'explication médicale. On ne peut pas dire que c'est plus complexe. Il n'y a aucune distinction au niveau médical.»

Enfin, une échographie pelvienne endovaginale est rémunérée à hauteur de 27,25 $, contre 66,25 $ pour une échographie transrectale, à savoir une différence de 143 %.

L'écart le plus faible à avoir été mesuré est de 33 %; il concerne l'ouverture et le drainage d’un abcès de la vulve ou des glandes et la même procédure pour un abcès intra scrotal.

«Ce que je trouve le plus préoccupant comme message, c'est le message qu'on envoie au sujet de la santé des femmes, a dit la docteure Brassard. Mais c'est sûr qu'on peut se demander si ça peut augmenter la pénurie d'obstétriciens-gynécologues.»

Un étudiant en médecine basera évidemment son choix de spécialité sur plusieurs facteurs. On ne peut pas savoir si le fait qu'un acte effectué sur une femme est moins bien rémunéré que le même acte chez un homme pourra influencer le choix de certains, mais les chiffres utilisés dans le cadre de cette étude sont du domaine public et donc accessibles à tous.

Et cela vient s'ajouter aux «enjeux particuliers» qui sont le lot des obstétriciens-gynécologues, a dit la docteure Brassard.

«Je ne vous cacherai pas qu'on est ceux qui travaillent le plus d'heures défavorables. Les accouchements on nous réveille, on est à l'hôpital la nuit, on travaille fort, on se lève tôt le matin, a-t-elle énuméré. Mais c'est sûr que si cette équité-là perdure dans le temps. Un des effets pervers, c'est que ça peut faire en sorte qu'on soit moins intéressants comme spécialité à choisir.»

L'AOGQ dévoile ces chiffres au moment où la Fédération des médecins spécialistes du Québec poursuit l'exercice d'équité entamé en 2022 pour revoir la valeur relative des actes médicaux. Les résultats sont attendus en 2025.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne