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Canada-États-Unis: Fond de tensions à la Confrontation des 4 nations

durée 12h30
10 février 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

Le Canada et les États-Unis partagent la plus longue frontière au monde sur près de 9000 kilomètres.

Les deux pays ont des économies interconnectées et de nombreux points communs sur le plan culturel. L'Arche de la Paix, à cheval sur la Colombie-Britannique et l'État de Washington, est censée symboliser cette amitié. Le pont de la Paix, quant à lui, relie l'Ontario et l'État de New York.

Mais les dernières semaines n'ont pas été paisibles.

Le président des États-Unis, Donald Trump, a annoncé des tarifs - une suspension de 30 jours a été négociée le 3 février - et continue d'affirmer qu'il souhaite faire du Canada le 51e État américain.

Malgré la pause sur les tarifs douaniers généraux sur les produits canadiens, Trump a déclaré dimanche qu'il annoncerait officiellement lundi des tarifs de 25 % sur toutes les importations d'acier et d'aluminium aux États-Unis, y compris celles en provenance du Canada.

Il y a bien sûr eu de nombreux désaccords dans le passé. En dehors de l'arène politique, cette rivalité est peut-être à son paroxysme quand les athlètes des deux pays s'affrontent, notamment sur la glace.

La Confrontation des 4 nations, un tournoi réunissant des joueurs de la Ligue nationale de hockey (LNH) et mettant en vedette les deux pays nord-américains, débute mercredi à Montréal.

Alors, que signifieront le malaise actuel et les menaces de tarifs de part et d'autre pour le match entre les deux pays qui s'annonçait déjà palpitant?

«Les Canadiens sont nationalistes et fiers, a déclaré Daniel Rubenson, professeur de sciences politiques à l'Université métropolitaine de Toronto. Ils ne veulent pas qu'on leur dise qu'ils vont être absorbés par un autre pays. Les chances sont plutôt minces, mais cette rhétorique met [les gens à cran].»

Les foules canadiennes ont hué l'hymne national américain dans la LNH et dans la NBA en réponse aux menaces de tarifs de Trump.

Cette tendance s'est quelque peu essoufflée quand les deux pays - le Canada a annoncé des tarifs en réponse si les États-Unis vont de l'avant avec leurs propres tarifs - ont temporairement mis sur la glace ces mesures commerciales. À Halifax, l'hymne américain n'a pas été hué lors du match de la Série de la rivalité, au hockey féminin.

La foule à Montréal lors des deux matchs du Canadien en fin de semaine a largement respecté l'hymne américain. Mais les partisans de la métropole, où Canadiens et Américains s'affronteront samedi dans le cadre de la Confrontation des 4 nations, ont hué plusieurs fois le «Star-Spangled Banner» au fil des années, dont après l'invasion américaine de l'Irak, en 2003.

«Le paysage politique est tellement instable aux États-Unis, a déclaré Amy Bass, professeure d'études sportives à l'université de Manhattanville, à Purchase, dans l'État de New York. Avoir une idée définitive de ce que ce match va signifier et de la manière dont il va se dérouler... nous ne le savons pas.»

Aaron Ettinger, professeur agrégé de sciences politiques à l'Université Carleton à Ottawa, a déclaré que le nationalisme est toujours en toile de fond de la scène sportive internationale.

«C'est ce qui rend les choses amusantes, a-t-il déclaré. C'est notre pays et notre peuple contre votre pays et votre peuple.»

Ettinger, dont les travaux incluent le croisement du sport et de la politique, ajoute que la fierté peut jouer un rôle important.

«Les Canadiens aiment battre les Américains dans le sport parce qu'on ne peut pas vraiment les battre ailleurs, a-t-il déclaré. Cette fois-ci, il y a de réels enjeux parce que les États-Unis et leur président menacent de nuire aux intérêts nationaux du Canada.»

Le principal rival du Canada au hockey a déjà été l'Union soviétique, puis la Russie, mais les États-Unis se sont hissés en tête de liste au cours des 30 dernières années.

Le Canada n'a pas encore perdu son statut de favori chez les hommes - du moins, pour le moment. Chez les femmes, le niveau est semblable, et les Américains ont remporté trois des cinq dernières éditions des Mondiaux juniors.

«C'est un endroit, peut-être le seul, où le Canada a été le grand frère», a dit Rubenson à propos de la patinoire.

La rivalité a été rude, mais amicale, a-t-il ajouté, mais le changement de ton de la Maison-Blanche pourrait signaler un changement dans cette relation.

«Les problèmes politiques et sociaux peuvent déborder», a déclaré Rubenson.

Les partisans et les politiciens pourraient s’énerver, mais les joueurs s’en soucieront-ils réellement?

De nombreux Canadiens jouent pour des équipes américaines. Le capitaine américain Auston Matthews, pour sa part, porte le «C» avec les Maple Leafs de Toronto.

«Je ne sais pas s'ils vivent dans le vrai monde, a dit Ettinger à propos des vedettes de la LNH. Ils vivent généralement dans la république d'élite du hockey sans vraiment savoir ce qui se passe dans le monde réel.»

Rubenson, dont la spécialisation inclut le sport et la politique, ne s'attend pas à beaucoup de changement dans le jeu sur la glace.

«Cette rivalité est déjà très intense, a-t-il déclaré. Les partisans inconditionnels n'ont pas besoin d'excuses. Les médias vont en parler et les partisans vont s'énerver.

«Ça pourrait créer une bonne ambiance – il n'y a rien de mal à ça.»

Bien que le conflit ne soit pas de la même ampleur, Bass a déclaré qu'une victoire canadienne à la Confrontation des 4 nations pourrait avoir une sensation au nord de la frontière similaire au triomphe des Américains sur les Soviétiques — le «miracle sur glace» — aux Jeux olympiques de 1980.

«C'était une victoire de la Guerre froide, a-t-elle déclaré. Les États-Unis sont-ils devenus les "grands méchants"? Battre les États-Unis ferait du bien pour une toute nouvelle raison.»

Ettinger a ajouté qu'en fin de compte, le refroidissement de la relation n'est pas tant entre le Canada et les États-Unis, mais plutôt entre le Canada et Trump.

«Les Américains, en général, ont une vision très favorable du Canada, a-t-il avancé. La relation économique est extraordinairement bénéfique pour les deux. Il se trouve que celui qui dirige la Maison-Blanche a des positions vraiment hostiles à l'égard de la plupart des pays étrangers.

«Particulièrement le Canada.»

Joshua Clipperton, La Presse Canadienne